La naissance d’une collection et d’un designer d’objet : Arthur Vallin & Chubby.

Arthur Vallin est tombé dans le design d’objet par accident. A la tête d’un studio de création à New-York, son activité se retrouve presque à l’arrêt avec la crise du Covid. Dans un monde confiné, il va alors se lancer dans la conception de vrais objets. Cela peut sembler contradictoire, voire une folie… Il nous partage son histoire qui l’a amené à créer la collection Chubby et nous révèle sa secret sauce.

 

 

 

Du design graphique à celui d’objets

Le point de départ est celui  d’un post Instagram de Mathieu Lehanneur qui attire son attention sur les possibilités offertes par la matière. “Je me souviens très bien : Il était dans une usine avec une machine qui découpait un bloc de marbre pour sa table Ocean Memories. J’ai vu ça et je me suis dit : on peut faire ça avec du marbre ?”

Arthur Vallin se renseigne alors sur cette technique. Il s'en suit rapidement des premiers dessins et des échanges avec des ateliers en France et en Italie. 

 



Son idée est de sculpter dans un seul bloc l’objet sans assemblage. Et ce concept plaît aux artisans avec qui il échange. Il avance ainsi par des itérations successives : il envoie des dessins, des plans et des modélisations 3D et reçoit des photos et des vidéos des premières pièces sculptées. 

La première collection voit ainsi le jour début 2021… Et il l’avoue, il n’a à ce jour jamais vu aucune des pièces réalisées, ni touché la matière. “S’il y a des artistes qui sont très dans la matière, tout est très digital [pour moi]. On est en 2022, je n'ai jamais mis les pieds dans les ateliers, j’ai produit des pièces qui sont livrées à Paris, aux Emirats, en Chine ou aux Etats-Unis. Je dois être un des seuls designers qui n’a jamais vu ces pièces.”


Et pourtant, à l’entendre parler de la matière et à voir ces formes sculpturales, on pourrait croire qu’elles sont vraiment nées de ses mains. C’est là toute la force du numérique de pouvoir concevoir à distance. Arthur Vallin a su détourner, adapter son médium de prédilection, l’imagerie 2D et 3D, pour non seulement dessiner des objets mais surtout leur donner vie. Ces outils numériques ont permis également de tisser des liens avec des artisans en leur fournissant les éléments nécessaires à la réalisation et en leur faisant confiance. Ce sont eux qui maîtrisent la technique et le savoir-faire propres au travail de la pierre. Chacun son rôle en quelque sorte.

Une approche exclusivement digitale

Tout commence par un travail en 2D, une ligne qui donne la forme globale et qu’il a appris à passer en 3D pour donner du volume, créer des courbes. Il raconte qu’au départ la collection Chubby était très fine, faites d’arcs assez anguleux. Mais lorsqu’il découvre en 3D la pierre tournée, les objets se révélaient très froids et loin de l’image qu’il avait : des formes voluptueuses, sensuelles, charnelles inspirées de l’artiste colombien Fernando Botero. Ainsi, grâce aux outils de modélisation 3D, il peut grossir les formes, rajouter de la matière et créer cette illusion d’optique en donnant l’impression que la pierre est pliée. Il place les veines du marbre de façon à créer cet effet. Un challenge que vont ensuite réaliser les artisans en mobilisant des savoir-faire ancestraux et des marbres d’exception. 

 

Aujourd’hui, il décline la collection Chubby dans d’autres matériaux : en bois, en conservant l’effet plié en jouant avec le sens des veines de chêne, et en bronze moulé à partir d’un modèle en travertin pour conserver les aspérités de la pierre.

 

Son prochain défi ? Sortir de la feuille de marbre et jouer avec la profondeur d’un bloc de marbre

Avec Chubby, Arthur Vallin commence à  appréhender la matière, à prendre conscience du sens des veines du marbre et des possibilités offertes lorsqu’on commence à penser en 3D.

C’est lors d’un voyage en Grèce qu’il découvre le marbre Naxos et le potentiel tridimensionnel de la roche. En effet, ce marbre généralement assez blanc est parfois strié de tâches noires à l’intérieur, dû à son oxydation. Longtemps considéré comme impur donc peu noble, il veut exploiter ses “défauts”, ses imperfections pour créer des pièces qui exploitent la profondeur et pas seulement la coupe. Il imagine plus de courbes encore dans la forme pour pénétrer dans la pierre et voir ses veines. 

En mobilisant là encore des outils numériques modernes, il veut créer une poésie visuelle et un nouveau langage formel. Conscient aussi qu’il y a un travail de recherche de bloc essentiel pour traduire cet effet séduisant à l’image.

Affaire et design à suivre ;)

 

← Article précédent Article suivant →